Artefacts est une vidéo issue d'un protocole de retouche de vidéo extrême. En utilisant les outils de retouche d'image dits « intelligents », j'ai supprimé toute trace humaine dans l'ensemble des plans de la vidéo.
Cela se traduit par la présence, parfois subtile, parfois extrêmement visible, de sortes de cicatrices en perpétuel mouvement. À cheval entre une vibration et une recomposition désorganisée et aléatoire, les stigmates laissés sur l'image témoignent de la violence de l'acte de suppression de l'humain et des limites des outils numériques lorsqu'il s'agit de recomposer des images.

La définition technique de l'outil utilisé est « suppression des éléments indésirables basée sur le contenu ». En réalité, une cascade d’algorithmes s'enchaine pour recomposer des éléments effacés (au préalable) en se basant sur les éléments restants tout autour sur l'image. Le logiciel cherche à boucher les trous de la manière la plus propre possible en analysant l'image et son contexte. Si cela fonctionne sur certains plans, lorsque le décor est simple ou que la suppression humaine laisse peu de trous, cette technique donne un tout autre résultat lorsqu'elle se retrouve obligée de recomposer des pans entiers de l'image avec peu ou pas assez d'éléments à copier.

J'ai toujours été attiré par les moments où le numérique entre en conflit avec son usage premier mais continue à fonctionner. C'est le cas de Terrarium où la photogrammétrie est utilisée pour scanner des arbres (techniquement impossible), ou encore dans Zero Dimension où j'exploite les bugs du moteur de rendu 3D pour donner forme à une nouvelle perspective. Ici, c'est la volonté acharnée du logiciel à recomposer l'image qui me plaît. Si le geste est éminemment violent (la retouche photo pour la suppression de personnages a été le grand outil des régimes totalitaires), le résultat ouvre sur une forme que je trouve poétique, à la fois par la démarche absurde de l'outil mais aussi par l'ouverture erratique dans la géométrie initiale de l'image.

Le travail dans une école donne une portée complémentaire : c'est un haut lieu de l'identification humaine. C'est là que nous nous forgeons, à la fois intellectuellement mais aussi socialement. Mais ces bâtiments sont aussi souvent impersonnels, tellement axés sur la praticité qu'ils en deviennent parfois déconnectés de l'humain. Le collège de Sainte Marie a l'avantage d'être un mix d'architectures différentes, le neuf et l'ancien s'y côtoient, ce qui offre un grand territoire d'expérimentations.

Voir la vidéo sur mon portfolio

--

Cette vidéo a été réalisée dans le cadre de ma résidence en milieu scolaire au collège de Sarzeau et soutenu par le département du Morbihan.